Lille, le 29 août 2025 — Damien Castelain, Président de la Métropole Européenne de Lille, était hier soir l’invité du journal télévisé de France 3 Nord–Pas-de-Calais à l’occasion de la présentation du bilan de mandat métropolitain. La question des transports, dont la MEL détient l’entière compétence, a naturellement occupé une place centrale. Face aux déclarations du Président, MobiLille tient à rétablir plusieurs vérités.
Contrairement à ce qu’affirme Damien Castelain sur le plateau de France 3, non, « tout n’est pas de la faute d’Alstom ». Le retard du projet de modernisation n’explique pas à lui seul la crise actuelle. La ligne 2, par exemple souffre du vieillissement de ses rames, qui devront progressivement quitter le réseau. Si une partie du parc de la ligne 1 sera transférée à l’arrivée des rames de 52 mètres, il faut rappeler que la MEL a refusé en 2019 une commande groupée proposée par Siemens à plusieurs métropoles françaises. Cette décision, motivée par un faux argument technique, prive aujourd’hui les usagers de trains qui auraient pu renforcer la fréquence de la ligne 2. La commande, désormais sur le point d’être passée, n’arrivera pas avant 2028 : un retard entièrement imputable à l’attentisme métropolitain.
La « découverte » d’amiante dans les rames n’est pas non plus de la responsabilité d’Alstom. Le tribunal administratif a rappelé « les conditions de fonctionnement de la ligne 2 »[1] ne relevaient pas de la responsabilité d’Alstom. L’amiante relève de la maintenance, non du chantier de modernisation. Déjà signalé en 2018 par les syndicats d’Ilévia, ce problème témoigne d’une négligence persistante de la MEL. Découvrir encore de l’amiante en 2024 démontre la gravité de ce manque d’anticipation.
Les difficultés liées au pilote automatique trouvent elles aussi leur origine dans la technique. Le problème majeur ne résidait pas dans le logiciel du système en soit, mais dans l’adaptation d’un pilote entièrement numérique à un matériel ancien, basé sur une technologie analogique.
En parallèle, le discours selon lequel la MEL afficherait un « bilan presque sans faute » sur le métro relève de l’hyperbole. Les usagers constatent au quotidien des rames vieillissantes, des lignes saturées, une hausse continue des tarifs et une qualité de service en baisse. Certes, la gratuité pour les moins de 18 ans et la tarification sociale constituent des avancées, mais elles ne suffisent pas à compenser une grille tarifaire globalement trop chère. MobiLille rappelle qu’elle reste opposée à l’augmentation tarifaire appliquée cette année basée sur le nouveau contrat de concession de service public entré en vigueur en avril dernier.
Lorsque la question d’indemniser les voyageurs s’est posée, la MEL a encore brillé par son manque de réactivité. Là où Rennes avait rapidement accordé une réduction de 50 % aux abonnés lors d’une panne d’ampleur sur la ligne B, la MEL a préféré attendre et proposer une compensation inadaptée : un an de gratuité au service VLille. Une mesure non seulement insuffisante, qui ne répondait pas à la situation mais qui était aussi inaccessible pour certains publics, notamment les personnes en situation de handicap. MobiLille l’avait par ailleurs dénoncé. Il aura fallu des mois, deux mobilisations et des interventions dans la presse pour enfin obtenir de la majorité métropolitaine un plan d’indemnisation de 4 millions d’euros voté à l’unanimité en ce début d’année 2025 pour une application en mai et juin.
Enfin, le plan Extramobile, présenté comme le projet phare du mandat, connaît lui aussi des retards majeurs. En tête d’exemple, le tramway Roubaix–Tourcoing, dont la mise en service était prévue en 2028 n’est plus attendu avant 2033 sur le tronçon Neuville-en-Ferrain – Hem et pas avant 2035 pour le prolongement vers Wattrelos, soit cinq ans de décalage. Les concertations publiques organisées dans ce cadre ont en outre montré leurs limites, à l’image de la réunion publique de Wattrelos où les habitants ont dénoncé un tracé imposé et jugé inutile. Il est important de rappeler également que contrairement à ce qu’affirme le vice-président aux transports, le tracé choisi n’est pas définitif. Un vote du conseil métropolitain ne fait pas tout. L’enquête publique sera le point final pour le tracé, ça sera elle qui le déterminera. Du côté de Lille, tout s’enlise et aucune date concrète n’a encore été annoncée, le projet n’étant pas au même stade d’évolution comme l’a rapporté La Voix du Nord.
En résumé, la MEL ne peut pas se féliciter d’un « bilan presque sans faute ». Les faits montrent au contraire une accumulation d’erreurs : absence d’anticipation, retards répétés, hausse des tarifs, attractivité en berne et choix techniques contestés. MobiLille continuera à porter la voix des usagers et à réclamer des solutions concrètes, rapides et adaptées afin que le réseau de transport métropolitain soit enfin à la hauteur des besoins des habitants.
[1] Pas de mesures complémentaires prononcées par le juge à l’encontre d’Alstom du fait des retards pris dans le chantier de modernisation de la ligne 1 du métro de la MEL. (2024, 26 janvier). Tribunal Administratif de Lille. https://lille.tribunal-administratif.fr/decisions-de-justice/dernieres-decisions/pas-de-mesures-complementaires-prononcees-par-le-juge-a-l-encontre-d-alstom-du-fait-des-retards-pris-dans-le-chantier-de-modernisation-de-la-ligne